J’ai rencontré Virginie Neufville sur Facebook lorsqu’elle a chroniqué ma traduction du Pulitzer 2014 (Le Chardonneret, Donna Tartt) pour son blog (Fragments de lecture) et a ensuite entrepris de m’interviewer pour La Cause littéraire (magazine littéraire en ligne) pour ce même livre. Depuis nous sommes « amies », certes virtuelles mais j’ai plaisir à suivre sur Facebook ses arrivages de livres, leur attente impatiente ou curieuse aussi, et puis à lire ses recensions, de littérature adulte comme jeunesse. Ce qui m’a donné l’idée de l’interroger sur comment et pourquoi l’on devient chroniqueuse littéraire, de nouvelles fonctions toutes bénévoles créés par le Net, qui permettent d’allier plaisir de lecture et visibilité, et surtout d’instaurer un partage, et parfois des échanges, avec de muliples autres passionnés de lecture. Car il faut l’être pour lire au rythme où elle le fait ! Attention, découverte, en 13 questions :
1-Virginie, qu’est-ce qui vous a donné l’idée de lancer votre blog littéraire (Fragments de lecture) et d’en devenir la chroniqueuse ? Un besoin impérieux de partage ? L’envie de faire oeuvre (culturelle) utile ?
Il fut un temps où l’expression « blog littéraire » me rebutait pour d’obscures raisons. J’avais besoin d’un site d’hébergement qui puisse accepter mes chroniques ; en gros, j’avais besoin d’un coach, même virtuel. Puis, avec le temps, l’idée s’est imposée à moi, et le blog me permet finalement d’héberger au même endroit toutes mes chroniques. Enfin, qui dit blog dit partage, et c’est l’essence même de ce que je recherche.
2-Par quel biais/moyen alimentez-vous vos lectures ? Une fois lancée, vous avez contacté les éditeurs pour qu’ils vous envoient des livres, j’imagine ? Selon vos affinités, j’imagine aussi ?
Il y a cinq ans, j’ai gagné un concours de chroniques sur le site MyBOOX.fr, ce qui m’a valu de choisir quatre livres par mois pendant un an. Puis, mes contributions pour le magazine La Cause Littéraire ont élargi mes possibilités de service presse. Aujourd’hui, j’ai un petit réseau de confiance ; je me tiens au courant des dernières parutions et je fais des demandes presse en fonction de mes envies de lecture. Quelques éditeurs m’ont contactée, et à chaque fois ce fut grâce à Twitter.
3-Votre blog a récemment passé la barre des 50 000 visiteurs (en un an), si je ne m’abuse ; comment arrive-ton à un tel résultat aussi vite ? Un bon référencement, de bons articles, un peu des deux, ou tout à fait autre chose ?
Je n’en ai aucune idée. Je suppose que cela vient du fait que j’offre des chroniques diverses et variées, aussi bien en littérature jeunesse, en albums jeunesse qu’en littérature générale. Je ne me cantonne pas à un genre et je tente de rester fidèle à mes envies.
Mon objectif est d’offrir autre chose que ce qu’on peut découvrir en général sur les blogs littéraires.
4-Facebook/Twitter vous apportent un complément de visibilité bien utile, j’imagine ?
Twitter m’a permis de nouer des relations sûres avec certaines maisons d’éditions. C’est un outil remarquable pour « se faire connaître ». Certes, Facebook reste un incontournable, mais Google+ a beaucoup contribué aussi à la visibilité de mon blog. Sans les réseaux sociaux, je pense qu’il est difficile de partager ses avis de lecteur avec un grand nombre de personnes.
5-Quel rythme de lecture avez-vous par semaine, et n’êtes-vous pas fatiguée de rédiger des chroniques, y compris sur les livres que vous n’aimez pas ? C’est tout de même très chronophage et vous avez par ailleurs un métier fatiguant (institutrice), ainsi que des enfants !
C’est une question qui revient souvent. Je lis entre deux et trois livres par semaine (en période scolaire), et j’écris mes chroniques très tôt le matin lorsque mes trois enfants dorment encore. Enfin, je ne le répéterai jamais assez, j’ai un époux très conciliant qui m’a toujours connue avec un livre en main. Côté travail, je compartimente. D’un côté je suis une maîtresse de CM2, de l’autre je suis une lectrice et une sportive assumée. La lecture est chez moi un besoin viscéral. Ecrire mes chroniques aussi.
6-Qui sont vos lecteurs ? Et échangent-ils avec vous, via Facebook ou autrement ? Ce feedback est-il important ? C’est lui qui vous motive ?
Les vrais échanges avec mes lecteurs se font par mail ou en messages privés via les réseaux sociaux. Ces lecteurs peuvent être le/la traducteur(rice) d’un ouvrage étranger que j’ai chroniqué, un auteur que j’ai rencontré à un salon littéraire, ou un amoureux comme moi de la littérature. Ces échanges sont importants pour moi car ils me permettent d’avoir du recul par rapport à ce que j’écris. Derrière un écran d’ordinateur, on a du mal à juger de l’impact des chroniques sur les lecteurs du blog.
7-Vous vous voyez tenir ce blog des années encore ?
Pourquoi pas, tant que l’envie est présente ! Si je dois faire des concessions pour attirer le chaland, ou commencer à chroniquer des livres qui ne m’intéressent pas pour que mon blog survive, alors il disparaîtra.
8-Lit-on avec un oeil différent lorsque l’on sait que l’on va chroniquer un livre ? Vous annotez, faites des fiches ? Chroniquer vous prend combien de temps ?
Je déteste l’expression « lecteur professionnel » dont certains lecteurs s’affublent sous prétexte qu’ils reçoivent des livres à lire de la part des maisons d’éditions. Selon moi, critique littéraire est un métier pour lequel on perçoit une rémunération, et ce n’est pas ma profession. Quand on alimente un blog littéraire, il est important de garder son indépendance et de préserver ses choix de lecture.
Depuis toujours, j’ai la mauvaise habitude de corner les pages où j’ai repéré soit un bon mot, soit ce que j’aime appeler « une fulgurance littéraire ». Ensuite, je retranscris les citations et mes notes sur des cahiers d’écoliers.
Ecrire une chronique me prend environ trente minutes ; finalement, le plus difficile dans cet exercice est de trouver un angle d’attaque pour commencer, le reste vient tout seul.
9-Quelles sont vos préférences en termes de genres et d’auteurs ?
Mes choix de lecture sont très variés. Ils vont de Stephen King à Richard Russo, en passant par Léonora Miano, s’il faut citer des noms. Il y en a tant d’autres qui me viennent à l’esprit ! J’essaie de ne pas me cantonner à un seul genre afin de diversifier mes plaisirs de lecture. J’ai bien un Panthéon personnel, mais il reste privé car je n’aime pas imposer mes préférences.
10-Où vous situez-vous par rapport à la vieille querelle littérature francophone/littératures étrangères (supposées tellement meilleures) ? Avez-vous une préférence ?
Je ne me situe pas car il y a du bon et du moins bon en littérature française comme en littérature étrangère. Ma préférence va cependant à la littérature japonaise pour son approche tout à fait différente du récit et des personnages. Enfin, le dépaysement y est garanti…
11-Vous êtes par ailleurs chroniqueuse pour La Cause littéraire. L’un complète l’autre, j’imagine ? Des variantes stylistiques (ou autres) dans vos chroniques selon les supports ?
J’ai quitté La Cause Littéraire en mai dernier. A l’époque, il arrivait que j’écrive deux recensions différentes pour le même livre si j’avais décidé de le partager sur d’autres sites. Avec Fragments de lecture, tout est plus simple, et je suis le seul maître à bord.
12-Auriez-vous envie de passer à la chronique papier (éventuellement rémunérée) pour un magazine, ou vous préférez la liberté d’être sur le Net, et surtout d’y être votre propre maître quand il s’agit de votre blog ?
Si l’opportunité se présente, pourquoi pas ! Mais bon, je suis consciente que ma liberté sur le Net a un prix. Qui dit rémunération, dit contrainte, donc il faudrait peser le pour et le contre. Certes, ce serait une certaine forme de reconnaissance, mais je pense n’avoir pas assez les dents longues pour me faire une place au soleil.
Affaire à suivre, donc…
13-Des conseils de cadeaux lecture en cette fin d’année ?? (nouveautés ou autres)
Oh c’est prévu, et ce sera l’objet d’un article sur le blog avant les vacances !
Merci, Virginie ! 🙂
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