104-initial-letter-l-thistle-q75-468x500Hips, pardon.

Livre ou littérature, il faut choisir ! Voilà ce que je voulais écrire.

Ma proposition peut vous sembler étrange, voire saugrenue, et pourtant elle souligne un clivage qu’il n’est pas inutile d’expliciter plus avant, simplement parce qu’il est à l’origine d’un regrettable malentendu : en 2012 la littérature n’existe pratiquement plus, elle a été avalée par le livre tout puissant, tout comme les écrivains – ceux qui ont une voix, et un univers très personnels – ont été foulés au pied par des auteurs vendeurs d’histoires.

Et ceci influence cela, y compris les écrits que vous commettez et que vous tentez, peut-être désespérément, de faire publier.

Sachez-le une bonne fois pour toute, la littérature n’intéresse plus grand monde  à part quelques rares éditeurs kamikazes comme les éditions Joca Seria (Nantes) avec leur collection Extraction dirigée par l’étonnante Chloé Delaume, et quelques petits éditeurs ici et là en France et en Belgique (Les carnets du dessert de lune, Maelström etc.) qui se battent courageusement contre la déferlante livresque, à défaut de littéraire, ce qui rend votre parcours du combattant d’autant plus pénible si par malheur – et de nos jours, c’en est un – vous êtes un littéraire, un vrai !

Produire des écrits littéraires exige non seulement de soigner son style, mais surtout d’en avoir un, d’avoir une voix, particulière, unique, douce ou vociférante – ce qui n’est certainement pas donné aux auteurs de livres – une voix qui happe, interpelle ou encore dérange le lecteur, ce que fait remarquablement Chloé Delaume (à suivre…), entre autres exemples probants. C’était aussi le cas de Duras, ce fut celui de Angot, sur lequel je reviendrai dans un prochain article, c’est toujours celui de Savitskaya.

Sauf que le lecteur n’en demande pas tant ! Il n’a franchement pas envie d’être happé, interpellé et encore moins dérangé, le lecteur. Habitué à des séries télé soporifiques ou à des films grand public tout ce qu’il y a de plus ineptes ou lisses (pour la plupart), le lecteur s’est vu servir trop de textes bien léchés et bien cadrés pour vouloir sortir des sentiers battus. Quand bien même il le voudrait, il aurait de toute façon du mal à trouver. Demandez autour de vous qui connaît Savitskaya et vous comprendrez le cénacle très fermé, hélas, auquel confine la littérature, la vraie.

Je crois avoir mis près de vingt ans à comprendre que ce que « les gens », donc le commun des mortels, voulaient, c’était des histoires bien ficelées, point barre. La poésie ne se vend plus, la prose poétique (mon créneau) non plus, les styles novateurs ne sont plus, de toute façon, dans un grand mouvement de nivellement par le bas, ce n’est plus le souci de grand monde et « ça donne mal à la tête » – je cite là un agent littéraire parisien, dont je tairai le nom, ayant au moins le mérite de résumer le sentiment général…

Tout cela pour vous dire quoi, cher lecteur de mon blog ?

Que – et bien sûr, c’est une situation que je déplore, mais je suis ici pour vous aider – si vous souhaitez multiplier vos chances d’être publié, mieux vaut vous ranger du côté du livre que de celui de la littérature. Car la plupart des éditeurs souhaitent toucher le commun des mortels, ce qui signifie accessoirement plus de ventes, c’est aussi simple que ça.

Il y aura toujours des exceptions, certes, il y aura toujours cet éditeur un peu fou qui voudra bien parier sur votre littérature atypique – ça m’est arrivé, j’y reviendrai, et c’est ce que je ferai férocement en tant que co-éditrice d’Eléments de langage -, mais ces éditeurs-là sont de plus en plus rares, leur distribution/diffusion est souvent problématique, et ils plient boutique assez régulièrement, épuisés par la lutte perpétuelle que représente une telle démarche, que ce soit avec les distributeurs, les libraires ou les journalistes.

Si vous avez le choix, en vérité je vous le dis, si vous avez le choix (un privilège précieux), écrivez de la littérature pour votre plaisir et réservez à la publication les plus simples de vos écrits, ceux qui racontent des histoires non avec des mots mais avec des événements, des incidents, des retournements, ceux qui ont des trames narratives construites et compliquées. Apprenez à raconter des histoires, très simplement – les exemples abondent dans la production contemporaine, et ils ne sont pas tous mauvais – et vous serez peut-être récompensés… A quelques exceptions près, sur lesquelles je reviendrai, je crois même que c’est la seule voie viable pour être édité(e) aujourd’hui, même si elle n’est pas automatique non plus, évidemment, ce serait trop facile.

Je ne souhaite à personne le calvaire que j’ai enduré, et je serais ravie pour vous si mes conseils pouvaient vous aider à l’éviter. Si je n’avais pas eu une force de caractère hors du commun, et le soutien de quelques écrivains qui ont cru en moi, j’aurais pu finir – et les cas ne doivent pas être si rares – comme John Kennedy Toole, suicidé à 31 ans pour n’être pas parvenu à se faire publier… Ce qu’il écrivait ne devait pas être si mauvais (…) puisqu’il a connu le succès après sa mort avec sa Conjuration des imbéciles, publication qu’il doit, si je ne m’abuse, à l’opiniâtreté de sa mère après son décès…

Comme l’idée serait plutôt que vous restiez en vie – tout le monde n’a pas une mère opiniâtre non plus – et publié de votre vivant, je reviendrai plus tard avec des livres qui peuvent vous aider à construire des histoires. Car c’est un art, pas facile  – peu le possèdent naturellement – et qui convient d’être salué pour tout le savoir qu’il demande à son auteur. A ce jour hélas je n’ai pas encore rencontré quelqu’un, un livre, qui sache allier style original et histoire prenante, exercice de haute voltige s’il en est. Après réflexion, peut-être Garcia Marquez dans Cent ans de solitude ? Peut-être. Il est vrai aussi que je suis exigeante, et farouchement élitiste. A moins que ce ne soit vous, l’auteur en question, celui/celle qui saura être non seulement un auteur mais aussi un écrivain ?

Ardente défenseuse de la littérature avant tout, malgré tout, je vous laisserai avec ce texte d’Hubert Nyssen, ancien directeur des éditions Actes Sud (Arles), répondant à la question « A quoi sert la littérature ? », non sans vous annoncer qu’à partir de la semaine prochaine je lancerai un blog complémentaire à l’intention des futurs traducteurs littéraires.

D’ici là, plein de belles lectures à vous, qu’il s’agisse de livres ou de littérature…

Après tout, il en faut pour tous les goûts !


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