Ils remontent tous à deux périodes particulièrement difficiles de mon existence, entre deux pays, deux continents, deux vies. Ce sont des livres phares, qui m’ont tenu la tête hors de l’eau ou m’ont aidée à prendre une décision sinon impossible à prendre.
Le premier, Propos sur le Bonheur, du philosophe Alain, avait d’abord été une découverte adolescente piochée dans la bibliothèque familiale, une sorte de vade mecum du bonheur tranquille, avec des petites phrases simples mais prégnantes, renvoyant chacune à ces fragments de plaisirs divers que l’on peut grappiller ici et là (un ancêtre de La Première gorgée de bière, en quelque sorte) et qui en fin de compte forment ce que l’on peut tenter de nommer « le bonheur »…
Ces recettes pratiques et philosophiques m’avaient enchantée quand j’étais adolescente.
Elles m’ont carrément fait remonter la pente quand, jeune adulte, je suis rentrée de Californie traumatisée par les tremblements de terres et les tueurs en série, le tout couronné par la mort de mon grand-père.
J’étais dans un sale état.
Les « recettes » d’Alain ont alors été un baume qui a délicatement aidé à cicatriser les plaies…
Le second, L’importance de vivre de Yutang Lin, m’a carrément sauvé la vie lors d’une énorme dépression aux origines nébuleuses lorsque j’habitais en Angleterre.
Je l’avais trouvé « par hasard » – en anglais, donc – dans la bibliothèque des deux charmantes musiciennes professionnelles chez qui j’habitais et je le leur ai « emprunté »…
Le 12 décembre 1983, j’allais encore très bien. A partir du 13 décembre 1983 18 heures mes journées ont été jalonnées de pulsions suicidaires aussi nombreuses qu’impérieuses, que j’ai tenté vainement de juguler à coups d’homéopathie et d’acupuncture, hélas bien insuffisantes.
Et c’est là que ce livre est entré en scène – son titre parle tout seul – me ramenant chaque jour à la vie et à l’importance d’être là, et d’y participer pleinement. J’y ai trouvé une philosophie de vie simple (mais pas simpliste) et y ai surtout puisé une force psychique qui m’ont aidée à tenir bon jusqu’à ce que les anti-dépresseurs prennent le relais. Car le banquet de la vie est devant nous et la seule question qui se pose est celle de notre appétit…
Sans ce livre, je pense sincèrement que je n’aurais pas eu la force de continuer à lutter contre des pulsions aussi morbides qu’insoutenables. Ce livre est toujours avec moi aujourd’hui, j’ai « oublié » de le rendre, le gardant comme un talisman au fil de mes nombreux déménagements…
Le troisième, Le Voyage à Ixtlan de Carlos Castaneda, m’avait été recommandé par le fils d’une grande amie dans un pub de Manchester où je m’interrogeais sur la suite à donner à ma vie après Etats-Unis et Angleterre… La lecture de ce « manuel du parfait guerrier, ou sorcier » – on peut le résumer ainsi – a été une véritable secousse électrique me faisant prendre intimement conscience de la finitude de l’existence – avec la mort toujours sur votre épaule gauche qui attend son heure – et donc de l’urgence qu’il y avait à vivre ses rêves sur-le-champ sans se perdre dans les peurs, les doutes ou les hésitations.
C’est grâce à cette lecture que j’ai pu quitter l’Angleterre (que j’adorais, mais où j’aurais végété), vivre un mois sur l’Aubrac dans une cabane sans eau ni électricité, m’installer ensuite à Nice quelques années, reprendre l’avion, pour finir par repartir vers les brumes nordiques (Pays-Bas puis Belgique).
C’est un livre que j’ai souvent recommandé, ou offert, et que je relis encore en trouvant toujours de la « substance » à glaner dans ces leçons de vie d’un vieux sorcier…
Cet article participe à l’évènement inter-blogueurs « Les 3 livres qui ont changé ma vie » organisé par le blog Des Livres Pour Changer de Vie. Si vous avez aimé cet article, je vous remercie de cliquer sur ce lien : j’ai aimé cet article !
hello Edith.
Fort intéressante ta présentation perso des trois livres. Je ne connais que celui d’Alain, Propos sur le Bonheur,qui m’a permis de relever la tête dans des périodes dépressives. Bon à pratiquer à tout âge. Je vais me commander les deux autres via Amazon.J’avais déjà entendu parler de Castaneda. Merci pour tes lignes sympas. Nine
Merci, Nine, pour ce sympathique commentaire ! Et bonne lecture !
Je viens de commander le lièvre (si tu fais l’article, mets des liens d’affiliation) !! 🙂
et de t’envoyer l’info pour participer aux 3 livres. Tous n’étaient pas marketing, non. En fait, il y a qqes semaines j’ai demandé àOR si je pouvais recenser sur son blog (article invité) 2-3 livres littéraires qui avaient changé ma vie ; il a dit oui, pourquoi pas, et 2 semaines + tard je recevais l’article que tu vas recevoir… Après bref survol, tout le monde ne semble pas être dans le marketing, Dieu merci !
Bonjour Edith,
je crois que je vais aussi participer à 3 livres qui ont changé ma vie mais je crains fort que la plupart des livres soumis soient dans la thématique Marketing, développement personnel… et du coup peut-être pas si littéraire… sauf si on lie les thèmes entre eux … à suivre
Pourrais-tu rédiger un article sur comment rédiger le meilleur polar français?
Merci et à bientôt
Ps Polar : comme ce n’est pas ma spécialité, je préfère ne pas m’y risquer, MAIS j’ai l’intention de recenser pour vous 2 livres sur la structure narrative/le suspense, ET d’interviewer une auteure de polars déjà évoquée (Nadine Monfils). A suivre !
Merci pour ton commentaire, Hélène, que tu devrais « poster » sur ton blog avec 2 autres recensions de livres… 😉 Je n’ai jamais lu Lanzmann (juste vu), et apparemment c’est un tort ! Je note tes impressions de lecture, tout à fait convaincantes, et je file de ce pas sur Amazon !! 🙂
Je partage cette émotion qui peut changer votre vie à la lecture d’un roman.
Je viens de terminer la lecture du Lièver de Patagonie de Claude Lanzmann, réalisateur de Shoah, l’oeuvre magnifique mise à l’écran pour témoigner de la mise à mort de millions de juifs pendant la dernière guerre mondiale.
Cette lecture m’a permise un retour en arrière dans ma mémoire où s’étaient enfouies les scènes qui m’ont le plus marquée quand j’étais enfant. La mémoire est toujours un non-dit de l’innommable: elle efface toujours temporairement ce qui dérange. Ainsi ce livre formidable participe bien à la mémoire collective afin de ne pas oublier.