Ca avance !

Entamée début juillet de l’an de grâce 2012, ma traduction de Merivel, a man of his time, avance très honorablement puisque je clôture cette semaine la première partie (il y en a trois).

Ceux qui ont suivi les épisodes précédents se souviendront que j’avais  stylistiquement hésité entre XIXe et XVIIIe, pour finir par apprendre que le style était du pur XVIIe…

Vous l’aurez compris, ma spécialité c’est le style du XXe, le début de ce siècle-là étant le plus tardif jamais traduit par mes soins ! D’où ces quelques hoquets stylistiques… 😉

Eh bien, eh bien, à mon grand étonnement le XVIIe me va plutôt bien au teint, finalement !

Et après des premières journées pour le moins… désemparées à me demander si j’arriverais même au bout de la première page, me voici qui gambade allègrement d’une préciosité à l’autre dans une sorte de quiétude que peu de traductions m’ont apportée, surtout si je me réfère à ma dernière traduction de l’anglais, American Subversive, truffée d’argot (or mes années américaines sont loin), et où j’avais dû même consulter des sites de fabrication de bombes (thriller écologique sur fond de terrorisme oblige), me demandant encore comment le GIGN n’a jamais débarqué chez moi ! Nul doute que je suis néanmoins fichée… 😉

Avec Merivel, rien de tel ! D’abord l’auteur est adorable et se propose de m’éclairer à chaque fois que ce sera nécessaire (certains coopèrent nettement moins). Ensuite point d’argot, ni de bombes à désamorcer, encore moins de portables qui sonnent ou de métros qui détonnent, c’est le calme intégral de la campagne anglaise, et cela me repose infiniment !

Bon d’accord, il y a eu un détour mouvementé par Versailles, mais ce cher Merivel va le quitter sous peu pour retrouver la douce Angleterre…

Us et coutumes linguistiques…

En attendant, moi j’ai juste à me concentrer sur des mots à vérifier (mais qui pour la plupart se trouvent dans le dictionnaire, vous n’imaginez pas le soulagement !), des
incises à guetter (j’adore supprimer les incises), des dialogues à condenser (j’enlève systématiquement il dit/elle répond etc.), l’ordre de certaines phrases à bouleverser pour que ça sonne français et que le texte soit fluide, à traquer dire, faire & chose, à réécrire pour affiner, encore et encore (mon travail connaîtra neuf couches de réécriture, alors que normalement j’en utilise entre quatre et six), et viser la concision chaque fois que c’est possible.

Rien que de très normal, finalement, et je me suis même habituée au passé simple, sans parler du bonheur qu’il y a chaque jour à manipuler une langue posée, raffinée, en deux mots élégante, qui me change agréablement des tweets, posts et autres textos que je reçois pendant ce temps-là…

Jugez plutôt :

Chère Madame,

 Je suis désolé d’avoir dû quitter votre maison sans avoir eu le temps de vous faire mes adieux.

Je rentre bientôt en Angleterre.

 Je vous prie de bien vouloir me faire l’honneur de votre présence dans le Jardin du Roi, près de l’endroit où l’ours est détenu en cage, mardi après-midi à deux heures.

Je demeure,

Votre humble serviteur,

Merivel

Cela vous a une autre allure que : Désolé parti vite ;  r-v 14h Jardin du Roi près ours avant départ GB. Bises.

Ou comment traduire du XVIIe en XIXe…

Dieu merci, et ainsi que déjà exposé, je n’ai pas à faire le grand écart pour un rendu XVIIe qui aurait été fort précieux, voire ampoulé. Pensum du jour, justement : enlever toutes les majuscules aux noms communs (effet de style emphatique de l’époque), qui auraient été gênantes, et trop artificielles, en français.

A l’instar de Gabrielle Rolin dans sa traduction du même auteur et de la même époque (Musique & Silence), je peux me contenter, avec la bénédiction de ma charmante éditrice, de voguer dans une langue classique, très simplement, juste soutenue, juste délicate, et je ne désespère pas de polir un petit bijou comme l’est Musique et Silence, dont je vous recommande par ailleurs chaleureusement la lecture (alors qu’a priori je n’aime pas les romans historiques !).

Du coup je n’ai finalement pas eu à relire un quelconque auteur du XIXe (premier mouvement), XVIIIe (deuxième mouvement) ou XVIIe (troisième mouvement) afin de m’imprégner d’un « certain » style, j’ai juste à laisser couler une langue soutenue, belle et fluide (et peut-être devrais-je arrêter Facebook et Twitter durant cet exercice ? ;-)) qui, à mon grand étonnement, me vient assez naturellement.

Je me demande bien dans quelle partie de mon cerveau elle a pu être logée tout ce temps ? Sans être abîmée par l’autre, celle que j’utilise au quotidien et qui est juste… banale (si si). Je m’étonne et m’émerveille moi-même, tout en me devant de préciser que neuf couches de relectures et réécritures sont tout de même nécessaires pour arriver à un bon résultat, du moins je l’espère !

Mais attention, d’ici quinze jours/un mois l’heure du verdict aura sonné et peut-être que mon éditrice et Rose Tremain auront été nettement moins emballées par ma traduction de la première partie que je vais leur envoyer sous peu… Je ne manquerai pas de vous tenir informés !

En attendant, il me reste à regarder Restoration, que je viens d’acheter en dvd, afin de connaître le début des aventures de Merivel (il s’agit une histoire en deux parties, dont je traduis la seconde, et dont la première a été adaptée en film) et me plonger dans l’époque et le personnage.

Rendez-vous est pris !

 Au plaisir de vous retrouver d’ici une quinzaine, donc !

Et si entre temps vous vous embêtez, n’oubliez pas tous les articles publiés sous l’onglet « Traductrice », ainsi que sous ce blog traducteurs.

A toute fin utile j’ai aussi à présent terminé des articles plus ludiques comme Ma bibliothèque idéale, Ma cdthèque idéale, Ma dvdthèque idéale, ou encore Ma pinacothèque idéale !

Et il y a aussi la newsletter « Auteurs » !

A venir : des interviews de traducteurs !

Et une conférence à l’université de Strasbourg en octobre. Mon intitulé : L’Histoire de la traductrice qui ne voulait pas traduire… 😉

Vos questions, comme toujours, sont les bienvenues…

 


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3 Commentaires

  1. Merci, merci, oh toi grande fan de Rose Tremain !! Je te réserve d’office un exemplaire du livre, qui hélas pour toi ne sortira pas avant sept… 2013 !! Si la version tapuscrite peut soulager ton impatience, elle sera prête fin janvier (2013) ! 🙂

  2. Vu le temps que tu dois passer sur cette traduction, ça fait plaisir de savoir que tu prends du bon temps ! Suis impatiente de découvrir ton travail sur cette oeuvre !
    J’aime déjà beaucoup lire tes articles, dont la langue est toujours fluide et riche à mes yeux.
    Bon courage pour la suite, chère Edith 😉